change avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Pour sa cinquime collaboration avec son cinaste ftiche Stphane Briz (qui runit ici nouveau devant sa camra le couple qu’il formait en 2009 avec Sandrine Kiberlain dans Mademoiselle Chambon), Vincent Lindon troque le costume du vigile ou de l’employ d’usine pour celui du cadre une “monte en gamme” sociale ouvrant d’autres problmatiques, non moins ralistes. Prsent en comptition Venise, Un autre monde (notez l’ironie triste du titre) est ici projet dans le cadre du festival Tlrama et assorti d’un change en direct avec le comdien, selon toute vraisemblance par vidotransmission compte tenu des circonstances sanitaires. Mais ne nous plaignons pas : les cinmas sont ouverts !

Un autre monde mardi 25 janvier 20h au cinma Le Club


Cinma |


Portrait inattendu et dlicat dune apprentie comdienne sous lOccupation rempli dclats autobiographiques discrets, le premier long mtrage de Sandrine Kiberlain est surtout un exceptionnel exercice de ralisation. Rencontre avec une jeune autrice qui va bien.

Vincent Raymond | Mardi 18 janvier 2022

Sandrine Kiberlain :

Vous avez attendu longtemps avant doser crire et mettre en scne. En cela, votre dmarche est parallle celle de votre pre, David Decca, qui avait attendu peu prs le mme ge pour se lancer dans lcriture dramatique

Sandrine Kiberlain : Ah, vous me cueillez ! a prend du temps en fait, doser faire un film ; surtout quand on eu comme moi la chance de travailler avec de grands metteurs en scne. Et puis, je suis trs heureuse comme actrice donc ce nest pas pour combler un manque ou un vide, mais parce que le chemin de lactrice que je suis depuis deux ans (rires) a fait que je me suis de plus en plus intresse lensemble de lquipe, comment un film se faisait Et puis, entrer dans lunivers des autres me passionne ; visiblement, a a dcoul sur lenvie de me raconter moi surtout davoir un thme ou un sujet

Je crois que jai toujours rv de faire un film ; mais quel film ? Il fallait attendre davoir un vrai point de vue, un angle qui fasse la diffrence et qui soit trait sous un angle singulier. Que ce soit une ide nce


En salle |


Les films qu’on a vus avant leur sortie les mercredis 19 et 26 janvier : revue de dtail des deux prochaines semaines au cinma.

Vincent Raymond | Mardi 18 janvier 2022

Les sorties cin

★★☆☆☆ Les Leons persanes de Vadim Perelman avec Nahuel Perez Biscayart, Lars Eidinger, Jonas Nay (19/01)

1942. Pour sauver sa peau, un prisonnier dun camp de concentration prtend tre iranien et se trouve contraint denseigner le persan (quil ignore) un officier nazi fou-furieux. Au fil des cours quil prodigue, il parvient inventer une langue ET mmoriser les noms des victimes (tr)passes par le sinistre camps. voquant la fois La Liste de Schindler comme Un hros trs discret pour le cadre abominable et le “miracle” qui sy produit, ce sujet haut potentiel tragique stiole toutefois dans la dure et son acadmisme, malgr linterprtation glaante de Lars Eidinger, en bipolaire roul dans la farine de sa propre suffisance.





★★☆


Interview |


Pascal Elb signe une charmante rom-com dans laquelle il campe un prof tombant des nues en se dcouvrant malentendant et amoureux de sa voisine interprte par Sandrine Kiberlain. Un regard original sur loue dfaillante, entre autres handicaps invisibles

Vincent Raymond | Mardi 2 novembre 2021

Pascal Elb

Quy a-t-il de personnel dans ce film ?

Pascal Elb : Absolument rien (sourire). Non, en fait, cest un problme personnel : jai perdu laudition il y a quelques annes ; ctait le prtexte parfait pour parler de sentiments, de notre rapport lautre, de cette poque o on a du mal se tourner les uns vers les autres, sentendre. On vit dans une poque ultra connecte, de relations damis virtuels, o il y a beaucoup de solitude pas que dans les grandes villes, dans les campagnes aussi. Alors un personnage amput dun sens, qui rencontre un autre personnage, elle aussi diminue dans son rapport lautre, jai trouv que a rsonnait, a salignait bien. Et comme jai dcouvert que jtais devenu romantique, jen ai fait une comdie romantique parce quapparemment le romantisme, cest quand deux personnes finissent par se trouver ce qui est un peu le principe de la vie.

Par rapport votre vcu, que vous a apport la lecture du livre de David Lodge, La Vie en sourdine ?

On m


Palme d’Or 2021 |


★★★☆☆ / Une carrosserie parfaitement lustre et polie, un moteur qui rugit mais atteint trop vite sa vitesse de croisire ppre En apparence du mme mtal que Grave, son premier et prcdent long mtrage, le nouveau film de Julia Ducournau semble effray daffronter la rationalit et convoque le fantastique en vain. Dommage.

Vincent Raymond | Jeudi 15 juillet 2021

1642523793 98 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Victime enfant dun accident de la route dont elle a t la cause, Alexia vit depuis avec une plaque de titane dans le crne. Devenue danseuse, elle se livre en parallle des meurtres affolant le sud de la France et “saccouple” avec une voiture. Pour se faire oublier aprs une soire trs sanglante, Alexia endosse lidentit dAdrien, un adolescent disparu depuis dix ans. Son pre, un commandant de pompiers dtruit, va cependant reconnatre ce “fils” prodigue et laccueillir

Programm par la Semaine de Critique en 2016, le sympathique Grave avait instantanment transform Julia Ducournau, ds son premier long mtrage, en nouvelle figure de la hype cinmatographique franaise. Sans doute les festivaliers, dj peu coutumiers des uvres se revendiquant dun “autre cinma” louchant vers le fantastico-gore, la srie B et les sances de minuit, avaient-il t titills par le fait que ce film soit sign non pas par lun des olibrius vaguement inquitants frquentant les marches du Palais (Gaspar No, Lars von Trier, NWR, Bertrand Mandico) mais par une jeune ralisatrice prsentant bien. Le peuple de la Croisette, et sans doute celui de


ECRANS |


D’douard Bergeon (Fr., 1h43) avec Guillaume Canet, Veerle Baetens, Anthony Bajon

Vincent Raymond | Mardi 24 septembre 2019

1642523793 633 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Fin des annes 1970. Pierre (Guillaume Canet) rentre des tats-Unis avec de grands projets pour lexploitation agricole familiale, quil loue en fermage son pre. Quelques annes plus tard, trangl par de trop nombreux investissements, Pierre perd pied. Et la faillite pointe son hideux visage

Connatre lorigine du projet biaise fatalement la rception que lon peut avoir du film : comment ne pas prouver de la sympathie pour la dmarche du ralisateur douard Bergeon, fils du personnage jou par Canet, racontant la tragdie vcue par son pre et, au-del, celle de milliers dagriculteurs lamins par le systme productiviste, saigns par les crdits et empoisonns par les produits “phytosanitaires” ? Car moins dtre du ct de lagro-business, on ne peut raisonnablement soutenir un modle qui tue la terre, produit hors-sol, dvoie mme les concepts “bio” tout en asservissant les paysans.

En prolongeant par une “fiction” (les noms ont t changs, pas les situations) porte par une star, douard Bergeon espre sensibiliser un plus large public cette question. Il le fera sans doute grce la force de frappe mdiatiq


ECRANS |


De Benot Jacquot (Fr, 1h38) avec Vincent Lindon, Stacy Martin, Valeria Golino

Vincent Raymond | Mardi 19 mars 2019

Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Au soir de sa vie, Casanova voque une confidente un pisode de sa vie aventureuse se droulant Londres, o il vivait alors en exil. Un souvenir douloureux li une femme dont il sest pris, qui jamais na cd sa cour : la Charpillon, une courtisane au corps et lesprit bien faits

Comment diable prouver de lempathie pour la personne de Casanova, laventurier qui pousa le XVIIIe sicle en triomphant des geles, des duels et des revers de fortune ; linfaillible sducteur que sa rputation en tous lieux prcdait et qui, de surcrot, taquina la muse pour composer, en sus de ses mmoires, quelques ouvrages rputs ? En le dpeignant dpourvu de ses talents et mrites, chevalier la triste figure confront au doute, lchec et la dchance. En rendant, en fait, ce hros hors norme sa qualit dhumain.

Le Casanova faonn par Benot Jacquot pour Vincent Lindon (et rciproquement) apparat ainsi comme une montagne de fragilit et de doute, au moment o la certitude de son prestige commence seffilocher, o de ladret son charme verse dans lubac. Dans lentre-deux des ges, entre deux pays, le Vn


ECRANS |


de Lisa Azuelos (Fr., 1h27) avec Sandrine Kiberlain, Thas Alessandrin, Victor Belmondo

Vincent Raymond | Mardi 12 mars 2019

1642523793 354 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Jade va passer le bac. Et ensuite ? Direction le Canada pour ses tudes. Comme elle est la dernire des trois enfants quitter la maison, sa mre Hlose commence angoisser lide de la sparation. Et de la solitude : Hlose vit sans mec, et a de surcrot un pre en petite forme

Il aura fallu Lisa Azuelos une tentative dloignement delle-mme (le faux pas Dalida en 2017) pour se rapprocher au plus prs de ses inspirations, et signer ce qui est sans doute son meilleur film. En cherchant exorciser son propre “syndrome du nid vide”, la cinaste a conu un portrait de parent (pas seulement de mre ni de femme) dans lequel beaucoup pourront se retrouver : gare dans lincertitude du quotidien, redoutant le lendemain, son hrone tente demmagasiner (avec son tlphone) le plus dimages dun prsent quelle sait volatil. Dans le mme temps, elle est gagne par une tendre mlancolie : des souvenirs de Jade petite se surimprimant par bouffes soudaines sur sa grande ado.

Grce ces flash-back doucement


ECRANS |


de Jeanne Herry (Fr, 1h47) avec Sandrine Kiberlain, Gilles Lellouche, lodie Bouchez

Vincent Raymond | Mardi 4 dcembre 2018

1642523793 108 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Une jeune femme arrive pour donner naissance un petit garon dont elle ne veut pas et qui aussitt est pris en charge par toute une chane dassistantes sociales et dassistants maternels. Au bout du compte, ce bb n sous X sera confi une mre clibataire en souffrance denfant

De lamour irraisonn lamour inconditionnel. Tel est le chemin que la ralisatrice Jeanne Herry a suivi, troquant lobsession rotomane destructrice de la fan de Elle ladore (2014) contre le bienveillant dsir dune mre mritante, son oppose exacte. Document lextrme, suivant une procdure dadoption dans ses moindres dtails psycho-administratifs aux allures parfois sotriques (le crmonial de rupture entre la mre biologique et lenfant peut ainsi laisser dubitatif), Pupille schappe heureusement du protocole jargonnant par la mosaque de portraits quil compose. Diversit dapproches, de caractres ; espoirs et dsespoirs ordinaires meublent lexistence des personnages intervenant dans la lente chane menant le bb sa future maman ; autant daccidents heureux ou malheureux permettant de mesurer la ridicule probabilit


ECRANS |


de Erick Zonca (Fr., 1h54) avec Vincent Cassel, Romain Duris, Sandrine Kiberlain…

Vincent Raymond | Mercredi 4 juillet 2018

1642523794 42 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Flic lessiv et alcoolo, le capitaine Visconti enqute sur la disparition de Dany. Trs vite, il prouve une vive sympathie pour la mre plore de l’ado, ainsi qu’une mfiance viscrale pour Bellaile, voisin empress, professeur de lettres et apprenti crivain ayant donn des cours privs Dany…

Des Rivires pourpres Fleuve noir, Vincent Cassel a un sens aigu de la continuit : les deux films sont on ne peut plus indpendants, mais l’on peut imaginer que son personnage de jeune flic chien fou chez Kassovitz a, avec le temps, pris de la bouteille (n’oubliant pas de la tter au passage) pour devenir l’pave chiffonne de Quasimodo au cheveu gras et hirsute louvoyant chez Zonca. Cette silhouette qui, entre deux gorgeons, manifeste encore un soupon de flair et des intuitions la Columbo ; ce fantme hant par ses spectres.

Terrible dans sa dchance et dsarmant dans son obstination rparer ailleurs ce qu’il a saccag dans son propre foyer, ce personnage est un caviar pour un comdien prt l’investir physiquement. C’est le cas de Cassel, qui n’avait pas eu habiter de


ECRANS |


Celui qui combat peut perdre. Celui qui ne combat pas a dj perdu. Citant Bertolt Brecht en prambule, et dans la foule de “La Loi du march”, Stphane Briz et Vincent Lindon senfoncent plus profondment dans lhorreur conomique avec ce magistral rcit pique dune lutte jusquau-boutiste pour lemploi. En comptition au Festival de Cannes.

Vincent Raymond | Mardi 15 mai 2018

1642523794 896 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Quand la direction de lusine Perrin annonce sa prochaine fermeture, les reprsentants syndicaux, Laurent Amdo (Vincent Lindon) en tte, refusent la fatalit, rappelant la rentabilit du site, les dividendes verss par la maison-mre allemande aux actionnaires, les sacrifices consentis. Une rude lutte dbute

Nul nest cens ignorer La Loi du march (2015), du nom de l’avant-dernire ralisation de Stphane Briz, qui sintresse nouveau ici la prcarisation grandissante des ouvriers et des employs. Mais il serait malvenu de lui tenir grief dexploiter quelque filon favorable : cela reviendrait croire quil suffit de briser le thermomtre pour voir la fivre baisser. Mieux vaudrait se tourner vers les responsables de ces situations infernales conduisant le commun des mortels crever, de prfrence la gueule ferme. Des responsables que Briz, et Lindon son bras arm, dsignent clairement ; rvlent dans leur glaant cynisme et la transparence de leur opacit.

Pot-pourri

Lhistoire d


ECRANS |


de et avec Daniel Auteuil (Fr, 1h24) avec galement Grard Depardieu, Sandrine Kiberlain, Adriana Ugarte

Vincent Raymond | Lundi 23 avril 2018

1642523794 584 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Daniel a invit dner son meilleur ami Grard afin quil lui prsente, ainsi qu sa femme, sa nouvelle compagne. Lorsquil dcouvre sa jeunesse et sa beaut, Daniel se prend imaginer des choses, sous lil de son pouse. Qui nest pas dupe…

Daniel Auteuil signe un film comme on fait plus. Un truc un peu inconscient et naf, de lpoque o les sexagnaires exhibaient sans complexes leur nouvelle voiture, leur nouvelle montre, leur nouvelle minette, comme autant de gages de succs. Aujourdhui, on dissimule tout ces “attributs” sous le vocable commun de “bonheurs” cela fait moins goste et moins dmon de seize heures. On assume moins que le personnage de Sydney Pollack qui vantait dans Maris et Femmes de Woody Allen (1992) les vertus de sa rcente et jeune compagne : sa bouche ? cest du velours

Adapt d’une pice de Florian Zeller, Amoureux de ma femme raconte peu ou prou la mme histoire que Woody Allen, mais corsete par lre du politiquement correct dans un (vaste) appartement parisien, et se sert de limaginaire dun poux rveur pour fantasmer un adultre. Comme cela, il ny a pa


ECRANS |


de Cdric Kahn (Fr, 1h47) avec Anthony Bajon, Damien Chapelle, Alex Brendemhl

Vincent Raymond | Mardi 20 mars 2018

1642523794 591 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

C’est la dernire chance pour Thomas. Lourdement dpendant, violent, le jeune homme a accept une retraite dans une communaut montagnarde dirige par dex-toxicomanes nayant pour soutien que le groupe, lamiti et la foi. Il va falloir tenir, avec la prire pour seul expdient.

Restant extrieur au protocole, comme un observateur privilgi un brin thologue, le ralisateur Cdric Kahn sintresse crment la trajectoire particulire de son protagoniste durant sa parenthse thrapeutique hors le monde “ouvert”. Ni proslyte, ni film charge, La Prire ne prouve ni n’lucide rien : il montre les effets (placebo ?). Sur ce point, chacun se fera sa religion une thrapie par lascse, o une addiction est dloge par une autre (menant du dsordre aux ordres), avant dtre chasse par une nouvelle ide fixe, dordre sentimental celle-l.

Le dclic de la gurison reste aussi brutal dans son mystre que la cristallisation amoureuse ou la survenue dun miracle


ECRANS |


De retour de la Berlinale, o son film “La Prire” a t distingu de lOurs dargent pour son jeune interprte Anthony Bajon, le ralisateur Cdric Kahn se confie. Sans se faire prier.

Vincent Raymond | Mardi 20 mars 2018

C

Le personnage de La Prire “nexiste” cinmatographiquement que durant son passage dans la communaut

Cdric Kahn : Javais crit une premire version du scnario il y a 5 ans o l’on racontait lavant, do il venait. Mais a ne fonctionnait pas. Ce projet a march partir du moment o lon a mis la prire au centre du rcit. Cela sest fait par tapes : le film commence quand il arrive et finira quand il part, comme un western ; comme quelquun qui tape la porte du ranch et dit : sauvez-moi !

La situation tait tellement forte, simple et lisible que plus on en racontait, plus elle saffaiblissait. On ne trouvait pas de meilleur enjeu que lhistoire dun gars arrivant en disant : jai failli mourir et jai envie de vivre. Tous les dtails ajouts sur la biographie amenuisaient le personnage. Cest assez trange, et un peu contraire toutes les rgles du scnario.

Quelles ont t vos sources documentaires ? Comment avez-vous recueilli les parcours de vie des rsi


Encore ? |


de Sophie Fillires (Fr., 1h35) avec Sandrine Kiberlain, Agathe Bonitzer, Melvil Poupaud

Vincent Raymond | Mardi 13 mars 2018

1642523794 239 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Quand Margaux, 20 ans, rencontre Margaux, 45 ans Chacune est lautre un ge diffrent de la vie. La surprise passe, lane paume tente de guider la cadette en lempchant de commettre les mmes erreurs quelle. Mais qui va corriger lexistence de qui ?

linstar de nombreux “films du milieu” tels que Camille redouble de Nomie Lvovsky ou Ae de la mme Sophie Fillire, il flotte dans La Belle et la Belle comme une tentation du fantastique. Mais un fantastique un brin bourgeois, qui ne voudrait pas (trop) y toucher ; admettant sagement les faits disruptifs et restant plat, en surface, sans dranger le moindre objet. Un effet de style ? Plutt lincapacit crer une ambiance par la mise en scne, puisquici tout se vaut. Vous qui entrez dans ce film, ne redoutez pas les atmosphres la Ruiz, de Oliveira ou des Larrieu ; ne redoutez rien, dailleurs, si ne ce nest le mol coulement du temps.

On a coutume de qualifier de “fantaisies” ces comdies dauteur redondantes tournes dans des catalogues Ika poutres apparentes et des TGV, en oubliant que ce mot mme de “fantaisie


ECRANS |


Aprs “Marguerite”, Xavier Giannoli revient avec “LApparition”. Vincent Lindon y campe un journaliste envoy par le Vatican dans les Alpes, o une jeune fille affirme avoir eu une apparition de la Vierge. Lenqute est ouverte

Vincent Raymond | Mardi 6 fvrier 2018

Xavier Giannoli :

Quest-ce qui vous a men sur ce chemin de la foi ?

Xavier Giannoli : Je ne crois pas que LApparition soit un film sur le chemin de la foi. Jai lu un fait divers o il tait question dune enqute canonique cest–dire une enqute diligente par un vque pour essayer de faire la lumire sur un fait surnaturel, “apparitionnaire”. Jai tout de suite compris que ctait un sujet de film, de cinma trs romanesque et trs intressant.

Jai t baptis, jai reu une ducation chrtienne, mais je ne suis pas pratiquant et je pense comme tout le monde que cette question du religieux, de la foi, de lexistence ou de labsence de Dieu est une question essentielle de nos vies. Javais lintuition que lenqute tait une proposition cinmatographiquement forte et originale.

Si ce nest pas un film sur la foi, alors quen est-il ?

Cest un film sur le doute. Des films sur la foi, jen ai vus. L, ce q


ECRANS |


de Xavier Giannoli (Fr., 2h21) avec Vincent Lindon, Galatea Bellugi, Patrick dAssumao

Vincent Raymond | Mardi 6 fvrier 2018

1642523794 679 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Encore bless et traumatis par la mort dun confrre sur le terrain, un reporter de guerre (Vincent Lindon) accepte de sortir de sa prostration quand un vque du Vatican lui demande de participer une enqute canonique : une jeune fille prtend que la Vierge lui est apparue, mais rien nest moins sr Le ralisateur Xavier Giannoli traite ici, comme dans nombre de ses ralisations prcdentes (ses courts-mtrages y compris), dune fascination pour une forme daura inexplicable ; la grce mystique prenant dans LApparition le relai de la notorit (Superstar en 2012), du charisme (Quand jtais chanteur en 2006) ou du (non-)talent artistique (Marguerite en 2015).

cette note fondamentale, il ajoute un autre thme rcurrent e


Cinma |


Pour commmorer le centenaire de sa disparition, Jacques Doillon statufie Auguste Rodin dans ses uvres. Lincandescence contenue de Vincent Lindon et le feu dIza Higelin temprent heureusement une mise en scne par trop classique. En lice Cannes 2017.

Vincent Raymond | Mardi 23 mai 2017

1642523794 773 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

De 1880 laube du XXe sicle, quelques particules de la vie dAuguste Rodin : sa notorit naissante, la passion fusionnelle vcue avec son lve et muse Camille Claudel, sa gloire parmi ses pairs maille de scandales artistiques, son caractre dursid

Malgr son titre lapidaire et globalisant, ce Rodin ne prtend pas reconstituer lentiret de lexistence du sculpteur sous des tombereaux de dtails mimtiques. Aux antipodes de ces mollientes hagiographies du type Czanne et moi, Jacques Doillon opte en effet pour une approche impressionniste, en pierre brute, voquant la dmarche de Maurice Pialat dans Van Gogh (1991) le temps et lobstination rapprochent par ailleurs les deux plasticiens, aux fortunes pourtant diamtralement opposes.

Burin

Malgr cela, Doillon ne parvient pas se dfaire dune forme de pesanteur acadmique et conformiste. Cinaste du heurt, de la parol


ECRANS |


Une ingnue sort du couvent pour se marier et mener une existence emplie de trahisons et de dsenchantements. Maupassant inspire Stphane Briz, ralisateur de l’acclam “La Loi du march”, pour un rcit asctique situ dans un XIXe sicle trangement raliste, et habit jusqu la moelle par Judith Chemla.

Vincent Raymond | Mardi 22 novembre 2016

1642523795 258 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Plutt que de tourner l’adaptation dUne vie, Stphane donnait limpression de vouloir raliser un documentaire sur les gens qui avaient inspir Maupassant ; de faire comme si lon avait la chance de retrouver des images dpoque, certes un peu diffrentes du livre : Maupassant ayant pris des liberts et un peu romanc ! Jean-Pierre Darroussin, qui incarne le pre de l’hrone Jeanne (un hobereau quasi sosie de Schubert), a tout dit lorsquil voque sa comprhension du projet artistique, voire du postulat philosophique de Stphane Briz.

Il y a en effet dans la dmarche du ralisateur une thique de vrit surpassant le classique dsir de se conformer la vracit historique pour viter lanachronisme ballot. Nulle posture, mais une exigence participant du conditionnement gnral de son quipe : plutt que de mettre en scne le jeu de comdiens dans lornire de la restitution de sentiments millimtrs, Briz leur fait intrioriser lextrme le contexte. Ils prouvent ainsi le froid ambiant sans recourir un vtement contemporain pour sen prmunir, ou sclairent une lumire exclusivement dispense par des bougies

Un film “natu


ECRANS |


Tout juste quinquagnaire, le cinaste affiche la satisfaction dun artisan ayant achev son Tour de France et son chef-duvre. Le fait est que “Une vie” est, nouveau, un grand film.

Vincent Raymond | Mardi 22 novembre 2016

St

Jeanne, hrone du roman Une vie de Maupassant (1883) que vous adaptez, est un personnage dune pure intgrit. Cest ce qui fait son malheur ?

Stphane Briz : Jeanne reste trs fidle au regard quelle avait sur le monde 20 ou 15 ans ; ce qui en fait un tre dune grande puret. Cet endroit du beau est en mme temps celui du tragique : il faut parfois tre capable de trahir son regard pour ne pas souffrir. Lorsque la bonne lui dit vous voyez, la vie cest jamais si bon ni si mauvais quon croit , cette simple phrase dite par une petite paysanne une phrase sublime, de trs haute philosophie lui fait accder la nuance aprs 30 ans de souffrance. Comme si deux nuages scartaient pour laisser apparatre cette vrit.

Je crois que jai voulu faire ce film pour accder cette nuance-l. En permettant Jeanne daccder cette nuance, jvite la dsillusion, trs douloureuse. Quand on est petit, on est dot dune certaine forme didalisme, ensuite on accde la ralit, la duplicit de lH


ECRANS |


Deux ados mal dans leur peau se cherchent et finissent par se trouver leur got. Renouant avec lintensit et lincandescence, Andr Tchin montre quun cinaste nest pas exsangue 73 ans. Vincent Raymond

Vincent Raymond | Mardi 29 mars 2016

Quand on a 17 ans

On avait un peu perdu de vue Andr Tchin depuis quelques annes : le cinaste a pourtant tourn sans relche (et en rond), sinspirant volontiers de faits divers pour des films titrs de manire la plus vague possible La Fille du RER, LHomme quon aimait trop Un cinma mille lieues de ses grandes uvres obsessionnelles et dchirantes des annes 1970-1990, de ses passions troubles, lyriques ou ravageuses. Comme si le triomphe des Roseaux sauvages (1994), puis dans sa propre adolescence, avait perturb le cours initial de sa carrire

Cela ne la pas empch dassner de loin en loin un film pareil une claque, une coupe sagittale dans lpoque ce fut le cas avec Les Tmoins (2007), brillant regard sur les annes sida.

Le chenu et les roseaux

De mme que certains crivains trouvent leur panouissement en tenant leur journal intime, cest en prenant la place du chroniqueur que Tchin se rvle le plus habile, accompagnant ses personnages de prfrence sur un


ECRANS |


De Benot Graffin (Fr., 1h33) avec Sandrine Kiberlain, douard Baer, Bulle Ogier

Vincent Raymond | Mardi 26 janvier 2016

Encore heureux

Quand des petits-bourgeois sattellent lcriture dune comdie vaguement sociale (chacun des mots mrite dtre pes : on suit ici une famille dont le pre, cadre-sup au chmage depuis 2 ans, squatte un studio des beaux quartiers parisiens) en faisant lconomie dun “script doctor”, la vraisemblance et la dignit en prennent pour leur grade.

Quelques exemple la vole ? Lhistoire est cense se passer autour du rveillon de Nol, de surcrot en week-end ; or tout est ouvert fort tard, y compris les administrations, qui nhsitent pas menacer, dailleurs, dexpulsion en pleine trve hivernale. Un besoin urgent dargent se fait sentir ? La mre sen va troquer ses faveurs contre un chque auprs dun belltre de suprette ah, le romantisme de la prostitution occasionnelle ! Mme en ajoutant un macchabe voyageur en guise dhypothtique ressort macabre (au point o lon en est), le scnario continue de tirer hue et dia, atteignant peine la cheville brise de la moindre pochade dhumour noir belge. Misricorde pour les comdiens ; ils devaient avoir faim

VR


ECRANS |


Sinspirant de laffaire de lArche de Zo, Joachim Lafosse confie un Vincent Lindon vibrant un rle dhumanitaire exalt prt tout pour exfiltrer des orphelins africains. Lanne 2016 pourrait bien tre aussi faste que la prcdente pour le comdien rcompens Cannes avec La Loi du march.

Vincent Raymond | Mardi 19 janvier 2016

Les Chevaliers blancs

Quil situe ses histoires dans le cadre intime dune famille en train de se disloquer (Nue Proprit, perdre la raison) ou, comme ici, au sein dun groupe gagn par le doute et min par les tensions, Joachim Lafosse suit film aprs film des schmas psychologiques comparables : il dcrit des relations excessives, o un dominateur abusif exerce une subjugation dvastatrice sur son entourage. Cette figure charismatique nest pas toujours anime ds le dbut dintentions malveillantes : ainsi, le personnage que joue Lindon dans Les Chevaliers blancs est m par une mission humanitaire quil considre comme suprieure toute autre considration, toute contingence, y compris la scurit des membres de son quipe.

La poursuite orgueilleuse de son idal va le faire glisser dans une spirale perverse. Hors de tout manichisme, Lafosse ne rduit pas ce mentor dviant aux seuls effets de sa malignit : sans chercher


ECRANS |


Bruno Podalyds retrouve le gnie comique de “Dieu seul me voit” dans cette ode la libert o, bord dun kayak, le ralisateur et acteur principal soffre une partie de campagne renoirienne et sassume enfin comme le grand cinaste populaire quil est.
Christophe Chabert

Christophe Chabert | Mardi 9 juin 2015

Comme un avion

Quest-ce quun avion sans aile ? Un kayak Drle dide, qui surgit par paliers dans la tte de Michel (Bruno Podalyds lui-mme, endossant pour la premire fois le rle principal dun de ses films). laube de ses cinquante ans, il sennuie dans lopen space de son boulot et dans sa relation damour / complicit avec sa femme Rachelle (Sandrine Kiberlain, dont il sera dit dans un dialogue magnifique quelle est lumineuse , ce qui se vrifie chaque instant lcran).

Michel a toujours rv dtre pilote pour laropostale, mais ce rve-l est dsormais caduque. Cest un rve aux ailes brises, et cest une part de lquation qui le conduira sobsder pour ce fameux kayak avec lequel il espre descendre une rivire pour rejoindre la mer. Une part, car Bruno Podalyds fait un dtour avant den parvenir cette conclusion : son patron (Denis Podalyds), lors dun nime brainstorming face ses employs, leur explique ce quest un palindrome. Pour se faire bien voir, tous se ruent sur leurs smartphones afin de trouver des exemples de mots se lisant lendroit et lenvers. Plus lent la dtente, Michel finira in extremis par tomber sur le mot “kayak”


ECRANS |


Comment un chmeur de longue dure se retrouve vigile et fait lexprience dune nouvelle forme dalination par le travail : un pamphlet de Stphane Briz, radical dans son dispositif comme dans son propos, avec un fabuleux Vincent Lindon.
Christophe Chabert

Christophe Chabert | Lundi 18 mai 2015

La Loi du march

Thierry, 51 ans, 20 mois de chmage derrire lui, constate avec calme laporie sociale dans laquelle il se trouve : dabord face un conseiller Ple emploi qui a bien du mal lui donner le change, puis la table dun caf o ses anciens collgues syndiqus tentent de lui expliquer quil faut attaquer le mal la racine. Et la racine, cest la malhonntet et lavarice du patron qui les a licencis. Mais Thierry nen dmord pas : il veut seulement du travail pour sortir de cette foutue prcarit dans laquelle il se trouve, cesser dpousseter les meubles et faire vivre sa famille dont un fils handicap. Alors, de guerre lasse, il accepte un emploi de vigile dans un centre commercial, o on linitie la surveillance des clients, mais aussi des autres employs.

Litinraire de Thierry a tout de la fiction difiante, proche sur le papier de ceux accomplis par les personnages des frres Dardenne. Mais Stphane Briz a sa propre manire pour filmer conflits moraux et injustices sociales lis au monde du travail. Celle-ci


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Mme si elle traduit un certain regain de forme de la part de Benot Jacquot, cette nouvelle version du roman dOctave Mirbeau a du mal tenir ses promesses initiales, linverse dune La Seydoux patante de bout en bout. Christophe Chabert

Christophe Chabert | Mardi 31 mars 2015

Journal d

Aprs Jean Renoir et Luis Buuel, Benot Jacquot tente donc une nouvelle adaptation du livre dOctave Mirbeau avec La Seydoux dans le rle de Clestine, bonne tout faire envoye de Paris vers la Province pour servir les bourgeois Lanlaire. Co-crit avec la jeune Hlne Zimmer ralisatrice dun premier long, 14 ans, sorti le mois dernier en salles ce Journal dune femme de chambre a lambition de revenir au roman initial en en slectionnant les pisodes plutt quen lactualisant.

Pendant trente minutes, le film sinscrit dans la droite ligne des Adieux la Reine : la camra et les comdiens prennent de vitesse la reconstitution historique, tandis que Jacquot, au diapason de son hrone, pointe avec sarcasme les rapports de pouvoir et ce qui va avec abus de pouvoir et droit de cuissage.

Cest ce qui sduit le plus dans cette ouverture, sans doute ce que Jacquot a film de plus brillant depuis des lustres : comment, en replongeant dans la France du dbut du XXe sicle, il offre un commentaire trs pertinent sur la


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De Fred Cavay (Fr, 1h30) avec Vincent Lindon, Gilles Lellouche

Christophe Chabert | Mardi 4 fvrier 2014

Mea culpa

Sur une ide dOlivier Marchal nous dit le gnrique de fin. Tout sexplique! Lide en question est en fait un fonds de commerce: un ex-flic traumatis et au fond du trou va tenter de se racheter en protgeant son fils et en flinguant tout va du mchant, ici des gangsters serbes dont les motivations sont trs sommairement rsumes: les filles et la came.
Justice expditive, tirage de tronches et gros accs de virilit sont donc au programme, mais l nest pas le problme de cet actionner la franaise. Il y a dun ct la minceur du scnario pas grave et de lautre sa farandole dincohrences, que Cavay tente de noyer sous une pluie de fusillades, poursuites et bastons qui ne justifient jamais la rputation de “bon artisan” applique un peu vite au cinaste.
Rien ne tient debout donc, que ce soit la gestion du temps, de lespace ou de llmentaire ralisme des situations les flics interviennent une bonne heure aprs un carnage homrique dans une bote de nuit, une bagnole va plus vite quun TGV On a tendance fustiger ltat de la comdie franaise; mais entre Besson, Cavay et Marchal, le polar dici nest pas f


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Annonc comme le retour de Dupontel la comdie mordante aprs le mal nomm “Le Vilain”, “9 mois ferme” savre une relative dception, confirmant que son auteur ne sait plus trop o il veut amener son cinma.
Christophe Chabert

Christophe Chabert | Jeudi 10 octobre 2013

9 mois ferme

Avec Enferms dehors, grand huit en forme de comdie sociale o il samusait devant la camra en Charlot trash semant le dsordre avec un uniforme demprunt, mais aussi derrire en lui faisant faire des loopings dlirants, le cinma dAlbert Dupontel semblait avoir atteint son acm. Le Vilain, tout sympathique quil tait, paraissait rejouer en sourdine les envoles du film prcdent, avec moins de fougue et de rage.
9 mois ferme, de son pitch (une avocate aspire par son mtier se retrouve enceinte, aprs une nuit de biture, dun tueur globophage amateur de prostitues) son contexte (la justice comme dversoir dune certaine misre sociale) semblait tailler sur mesure pour que Dupontel y puise la quintessence la fois joyeuse et inquite de son projet de cinaste. Certes, on y trouve beaucoup dexcs en tout genre, une camra dchane et quelques passages ouvertement gore, mais aussi des choses beaucoup plus prvisibles, sinon rassurantes. Il y a surtout un mlange de registres comiques dont le moins que lon puisse dire est quils


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De Serge Bozon (Fr, 1h46) avec Isabelle Huppert, Franois Damiens, Sandrine Kiberlain

Christophe Chabert | Mercredi 4 septembre 2013

Tip Top

L’engouement critique autour du dernier Serge Bozon, dj coupable davoir ralis La France avec ses poilus entonnant des chansons mods, en dit long sur lgarement dans lequel senfonce une partie du cinma dauteur franais. Encenser avec une complaisance navrante le film le plus mal foutu de lanne, dont la vision relve de lexprience narcotique tant ce qui se produit lcran na aucun sens, aucun rythme et passe son temps se chercher des sujets en faisant mine de se rattacher des genres dans cette comdie policire, rien nest drle, et lintrigue est raconte en se moquant de la plus lmentaire logique cest offrir Bozon ce dont il rve le plus: lgitimer son discours en fermant les yeux sur son incomptence de ralisateur.
Disciple de Jean-Claude Biette et de son cinma de la digression, Bozon en offre une version dandy, o les intentions maculent lcran. Tip Top parle vaguement de son poque du racisme la perversion sexuelle, mme si on ne sait trop ce que le cinaste a en dire mais cest dans une poigne de squences what the fuck que lon sent Bozon le plus content de lui, comme celle o, deux minutes durant,


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De Claire Denis (Fr, 1h40) avec Vincent Lindon, Chiara Mastroianni

Christophe Chabert | Mercredi 10 juillet 2013

Les Salauds

Jai pas sommeil, Trouble every day, Les Salauds : trois films qui, dans luvre de Claire Denis, forment une sorte de trilogie de lhorreur, o elle fouille les dsirs monstrueux pour en sortir des rcits en forme de cauchemars veills. On peut aussi y voir lasymptote dune carrire, du vouloir-dire omniprsent (Jai pas sommeil) un plus rien dire franchement gnant (Les Salauds), avec au milieu un point dquilibre fragile (Trouble every day, son meilleur film).
Les Salauds donc, est une sorte de magma filmique incohrent, que ce soit dans lenchanement des squences ou celui des plans, o Denis senfonce dans le ridicule mesure quelle sapproche de limmontrable. Grotesque, ce plan rcurrent de Lola Creton avanant nue sur une route le vagin ensanglant; ridicules, ces scnes de cul entre Lindon et Mastroianni; risible, ce porno final qui semble rpondre ceux que projetait Lynch dans Lost highway. Tout cela parat assembl larrache sur un banc de montage, comme un work in progress dnu de sens, masquant grand pe


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d’Alice Winocour (Fr, 1h41) avec Vincent Lindon, Soko, Chiara Mastroianni

Jerme Dittmar | Jeudi 1 novembre 2012

Augustine

Si les images de Charcot n’ont cess d’irriguer le cinma (de Furie A.I en passant par Carrie), rarement l’histoire du docteur et sa patiente star, Augustine, n’a fait l’objet d’un film. Alice Winocour de compenser cette absence avec un premier long aussi ambitieux que petit l’arrive. La faute une approche trop polie, presque scolaire, qui ouvre autant de pistes thoriques qu’elle enferme la mise en scne dans un carcan appliqu et limit. Tout est finalement si rflchi, dans cette histoire sur les mystres de la sexualit fminine, qu’aucune ambigut n’merge. L o devraient exister des personnages branls par leurs dsirs, fascins par une attirance rciproque dans un monde aux portes de la psychanalyse et du spectacle permanent, surnagent deux acteurs films par une camra proche de l’acadmisme tlvisuel. Pas facile aussi d’tre boulevers par la semi-lourdeur de Soko dans le rle d’Augustine. L’actrice, jamais troublante, plombant limite le film elle seule.
Jrme Dittmar


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De Marc Fitoussi (Fr, 1h41) avec Sandrine Kiberlain, Audrey Lamy

Christophe Chabert | Mercredi 26 septembre 2012

Pauline d

Sur les pas de Pascal Thomas priode Agatha Christie, Marc Fitoussi (La Vie dartiste, Copacabana: un bon auteur de comdie, donc) se vautre compltement avec ce Pauline dtective qui sent vite limpasse. Il faut dire quentre les dboires sentimentaux trop ordinaires de ladite Pauline, et ses vacances avec sa sur et son beau-frre en Italie, pleines de clichs sur les Franais ltranger, le fond de la sauce est dj pais. Mais cest bien dans le vrai-faux film policier que les choses virent au naufrage: que Pauline sentte voir du crime et du mystre partout, soit; mais lindiffrence gnrale qui entoure ses vellits de dtective, commencer par celle de Fitoussi, trop occup dessiner un contexte pop coups de couleurs acidules et de dressing top tendance, ne permet aucune identification au personnage et aucun dbut dintrt pour lintrigue. On comprend vite quon est face une suite de fausses pistes traites au deuxime degr et sans aucune rigueur, sacrifiant au passage la pauvre Sandrine Kiberlain, dont la carrire vivote depuis


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Rencontre avec Stphane Briz, ralisateur de “Quelques heures de printemps”, cinquime film de cet amoureux des silences gns, des plans squences qui donnent le vertige et dun cinma qui crerait des motions (fortes).
Propos recueillis par Christophe Chabert

Christophe Chabert | Lundi 17 septembre 2012

1642523796 938 Echange avec Vincent Lindon pour Un autre monde

Comment en tes-vous venu crire ce scnario original, aprs ladaptation dric Holder pour Mademoiselle Chambon ?Stphane Briz : Mademoiselle Chambon est pour linstant lexception, ctait la seule adaptation que javais faite jusquici. Aprs, comment nat une histoire, cest une question que lon pose rgulirement aux ralisateurs, et ils rpondent en gnral que cest assez mystrieux. Dans mon cas, cest trs organique: quelque chose dans ma vie me pousse vers une histoire. Il y a deux choses ici: la difficult de communication entre un fils et sa mre, cest autour de cela que lon a tout structur; et un autre lment dramaturgique fort, le choix de cette femme de mettre fin ses jours par un suicide assist. Je crois que cest la premire fois quon le voit dans une fiction. a tonne, a questionne, a fait cho des choses qui sont voques en ce moment par les politiques.
Est-ce que ce qui rend possible un film pour vous, cest le moment o les deux comdiens simposent ?Pas du tout, a ne part pas dun comdien. Lenvie tait partage avec Vincent Lindon de retravailler avec lu


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Un fils sort de prison et renoue des rapports lectriques avec sa mre malade. Avec ce film poignant emmen par une mise en scne sans psychologie ni pathos et deux comdiens incroyables, Stphane Briz saffirme comme un grand cinaste.
Christophe Chabert

Christophe Chabert | Vendredi 14 septembre 2012

Quelques heures de printemps

Cest un malentendu qui persiste et qui sagrandit: un fils, Alain, et sa mre, Yvette, deux chous de la classe moyenne dans une banlieue pavillonnaire en Bourgogne. Lui vient de purger un an et demi de prison pour une connerie qui lui a cot cher, elle souffre dune tumeur au cerveau dont lavance inluctable la pousse envisager un suicide assist en Suisse. Les voil nouveau sous le mme toit, mais les preuves ne les rapprochent pas; au contraire, le foss du ressentiment qui a toujours exist entre eux se creuse encore. Un ressentiment qui est surtout affaire de non-dits. Dans Mademoiselle Chambon, Stphane Briz mettait en scne des silences qui en disaient long sur le dsir et le sentiment amoureux; avec Quelques heures de printemps, le silence se fait douloureux, blessant, cruel. Commenc la manire dUn mauvais fils de Sautet, le film bifurque peu peu vers un territoire qui lui est propre, o le cinaste observe la dernire tentative de communication entre Alain et Yvette avec un vrisme constant (de laccent d


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DYves Caumon (Fr, 1h33) avec Sandrine Kiberlain, Clment Sibony, Bruno Todeschini

Franois Cau | Jeudi 19 janvier 2012

L

Alors que partout ailleurs, le cinma dauteur semble prendre conscience que la radicalit formelle ne vaut rien si elle ne sert pas intensifier les motions (des personnages et des spectateurs), la France continue dlivrer des films poissons-mort, beaux mais froids et lil vide. Oiseau-mort dans ce cas prcis, puisque Yves Caumon fait de la brve existence du volatile, incrust dans lappartement dune Sandrine Kiberlain qui, pour une fois, ne se retrouve pas jouer les seconds rles indignes de sa valeur dactrice, la dure ncessaire de son retour la vie. Le dbut, intrigant, ressemble certains Polanski premire priode: le film observe une nvrose depuis les craquements des murs, les ombres du dehors, les manies inexpliques de lhrone Quand il saventure hors de lappartement, le film perd peu peu toute tranget, mais surtout, Yves Caumon rvle trop tt le pourquoi de ce comportement, ramenant le tout un banal psychodrame. Ne reste plus alors que larrogance de longs plans mticuleusement composs et clairs, un cinma qui se regarde filmer et qui ne vhicule ni motions, ni ides, juste des intentions. CC


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De Philippe Lioret (Fr, 2h) avec Marie Gillain, Vincent Lindon

Christophe Chabert | Vendredi 4 novembre 2011

Toutes nos envies

Librement inspir du roman dEmmanuel Carrre, dit le gnrique. Cest un euphmisme. De Dautres vies que la mienne, Philippe Lioret na retenu que le squelette : le dernier combat dune juge atteinte dune maladie incurable contre les socits de crdit provoquant sciemment le surendettement de leurs clients. Tout le reste nest quun remake de son prcdent Welcome.

Le plus frappant, cest labsence durgence dans la narration : plus occup mettre en scne les silences que laction, Lioret en oublie que son sujet repose sur un double contre-la-montre. Seul le mlodrame lintresse ; mme quand il invente une mre de famille surendette, cest pour la dpeindre comme une femme exemplaire (on nest pas chez les Dardenne) et en faire une future maman de substitution la juge condamne.

On ne sintresserait aux problmes des autres que quand ils finissent par sinviter dans notre quotidien Chez Carrre, la chose tait bien plus mtaphysique ! Mme le trouble amoureux qui devrait natre entre Gillain et Lindon ne donne lieu qu de pauvres rebondissements vite vacus par la pudibonderie du rcit. Tout ici est aseptis, plat, s


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Alain Cavalier, Prsident de la Rpublique, nomme Vincent Lindon Premier ministre, tche quil prend trs au srieux, au point de se lancer dans la course linvestiture contre son mentor. Ce nest que du cinma, bien sr, mais ce point dintelligence ludique, le cinma est bien plus que la ralit.
Christophe Chabert

Franois Cau | Mardi 14 juin 2011

Pater

Il tait une fois un cinaste qui avait un acteur pour ami, et qui voulait faire un film avec lui. Prcision importante : ce cinaste, qui sappelle Alain Cavalier, se mfie depuis vingt ans des acteurs professionnels et de la machinerie quimplique un tournage de fiction, prfrant filmer seul avec sa petite camra des instants de ralit quil transforme par son regard singulier en spectacle cinmatographique. Autre prcision : lacteur-ami, cest Vincent Lindon, sans doute le comdien le plus passionnant du cinma franais, celui qui nest jamais l o on lattend, traversant tous les territoires avec un mlange de curiosit et dintgrit. La rencontre entre ces deux figures rtives la classification parat tomber sous le sens, mais de quel film pouvait-elle accoucher ? Pater est dabord lhistoire de ce ttonnement : Cavalier retrouve Lindon dans un htel, ils discutent sans but prcis, notamment de lemploi du temps de Lindon (il tourne simultanment La Permission de minuit). Et puis, par un coup de force que Cavalier rend immdiatement naturel, les voil de chaque ct dune table : Alain Cavalier est Prsident de la Rpublique, et il nomme Vincent Lin


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De Stphane Briz (Fr, 1h41) avec Vincent Lindon, Sandrine Kiberlain

Franois Cau | Samedi 10 octobre 2009

Mademoiselle Chambon

Jean tombe sous le charme de Mademoiselle Chambon, linstitutrice de son fils. Il simprovise gauchement maon du cur et propose de rparer la fentre de son appartement. Pour le remercier, elle fait pleurer son violon dans laustrit de son salon. Ils se recroisent, schangent des regards, se frlent grand peine. Jean fuit son pouse, Mademoiselle Chambon souffle le chaud mais surtout le froid. Dj pas franchement survolte, lambiance sabme dans les non-dits, les chastes silences, les illades intresses, le tout dans une dynamique faire passer Les Regrets de Cdric Kahn pour Bad Boys 2. Stphane Briz choisit sciemment de se focaliser sur lexpression quotidienne de la passion, freinant systmatiquement ses personnages dans leurs lans, quitte en faire les reprsentations statufies de lindcision, dune certaine ide de la transparence amoureuse. Cest quand ils finissent par quitter leur mcanique routine que le film prend son envol, dans des scnes o la rserve du film comme ses partis pris esthtiques finissent par prendre tout leur sens : Briz soigne particulirement ces squences pudiques, o le talent des acteurs principaux brille de faon intense. Puis


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Une nouvelle fois, Philippe Lioret nous touche en plein cur, la grce dune foi cinmatographique totale en son sujet.

Franois Cau | Jeudi 5 mars 2009

Welcome

Mea maxima culpa : on tait un tantinet dfiant en entrant dans la salle. Bon, dj, le synopsis nous semblait hautement improbable (un prof de natation calaisien, en un geste implicite et dsespr pour reconqurir son ex-pouse, prend sous son aile un jeune clandestin kurde dsirant traverser la Manche la nage). Ensuite, la collaboration scnaristique dOlivier Adam nous chaudait un peu : dans son roman labri de rien, ce dernier nous dpeignait dj les rapports des habitants de Calais avec les sans-papiers, sous le joug dune vigueur motionnelle pas toujours canalise. Enfin, aprs le drame poignant Je vais bien, ne ten fais pas, on imaginait mal Philippe Lioret revenir sans encombre aux problmatiques sociales de ses dbuts, qui plus est sur un sujet dactualit aussi brlant, sans tomber dans le misrabilisme ou la dnonciation la truelle.

Heureusement, ds les premires scnes, le metteur en scne nous fait rougir de honte de cumuler autant da priori. Sa glaante description des conditions de voyage des clandestins nous immerge derechef dans le rcit, le glissement narratif vers le personnage principal (Vincent Lindon, tout simplement

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